Nul ne saura jamais où le numéro un mondial de la joaillerie cache ses joyaux. La rue est banale ; la ville, en Europe, triste à pleurer. Mais pouvoir entrapercevoir ces mirifiques parures de maharajas, ces panthères dévorant des saphirs dodus ou ces pendules mystérieuses est un privilège. D’autant plus rare qu’en cette époque instable le moindre bijou est mis sous clé, se dérobant au regard et au toucher.
Après trois ans d’attente, le fameux sésame est enfin obtenu pour découvrir ces obscurs objets du désir. Le P-DG de Cartier, Cyrille Vigneron, avait prévenu: «Cette collection ressemble à la caverne d’Ali Baba, elle comble les rêves de princesse, les envies de posséder un trésor de pirate, le besoin de merveilleux propre à l’être humain. »
Reptilien. Collier serpent commandé par l’actrice Maria Félix. En platine, émail et diamants. 1968. PARIS MATCH / © NICOLAS KRIEF
Le jour J, dans un immeuble truffé de caméras où seul le cliquetis des sas de sécurité vient troubler le silence, une porte s’ouvre sur une pièce beige immaculée. Sur la table, des joyaux d’une beauté inouïe patientent sur des plateaux rouges, en rangs tels des enfants sages. En couvant du regard ses ouailles, Pascale Lepeu, conservatrice de la Collection Cartier, relate l’arbre généalogique de cette famille exceptionnelle.
Bleu nuit. Broche en platine, diamants et saphirs. 1912. PARIS MATCH / © Nicolas Krieff
«L’acte fondateur remonte à 1973, quand Robert Hocq, alors président de Cartier à Paris, rachète aux enchères une pendule mystérieuse, “Portique”, la première d’une série de six réalisée en 1923. Elle appartenait à la cantatrice d’origine polonaise Ganna Walska. Dix ans après, la collection voit officiellement le jour. L’objectif était de constituer un fonds patrimonial représentatif de la production de la maison depuis sa fondation en 1847, et de le partager. Dès 1989, nous avions rassemblé assez de modèles pour une première exposition au Petit Palais à Paris.» Depuis, une quarantaine d’expositions dans le monde ont accueilli les précieux éléments de cet ensemble.
Emblématique. Collier hindou de Daisy Fellowes, en diamants, émeraudes, rubis et saphirs gravés de 1936. Broche panthère de la duchesse de Windsor, ornée d’un saphir cabochon de 152 carats. 1949. PARIS MATCH / © NICOLAS KRIEF
Forte d’environ 4000 pièces représentant trois siècles de création – de la fin du XIXe jusqu’à l’époque contemporaine –, la Collection Cartier est sans doute l’une des plus importantes de cet univers. Outre la diversité (bijoux, horlogerie et objets), elle se distingue par la cohérence de son style pourtant marqué de nombreuses influences. «Cartier, c’est un peu comme Picasso! poursuit Pascale Lepeu. Ils ont en commun d’avoir eu des périodes différentes. Si, en termes d’inspiration – russe, persane, égyptienne, chinoise –, la liberté est totale, il y a toujours une exigence absolue de la qualité des matières premières utilisées et dans le savoir-faire des bijoux.»
Exotique. Vendue en 1940 au duc de Windsor, cette broche flamant en diamants, rubis, émeraudes et saphirs. PARIS MATCH / © Nicolas Krieff
Sens des volumes, contraste des couleurs tissent le fil rouge qui relie les créations entre elles. Récemment acquis, un diadème de 1912 en cristal de roche et diamants, représentatif du style guirlande de Louis Cartier, partage la même écriture racée que la montre-bracelet Santos-Dumont, une épure imaginée aussi en 1912 pour l’aventurier brésilien. Le charivari de rubis rouge cerise, de saphirs céruléens, d’émeraudes vert mousse, gravés selon la tradition indienne et qui composent le collier Tutti Frutti de Daisy Fellowes, se retrouve dans le choc des coloris du collier draperie de la duchesse de Windsor en turquoises, améthystes et or jaune de 1947. Parmi les pièces spectaculaires, citons ce collier en perles de jade que la milliardaire américaine Barbara Hutton reçut de son père à l’occasion de son mariage avec Alexis Mdivani en 1933. La perfection de la matière et du vert de ce joyau fit s’envoler les enchères en 2014 lorsque Cartier le racheta pour la somme de 27,44 millions de dollars, soit 1 million de dollars par boule de jade!
Précieux. Collier en jade impérial ayant appartenu à Barbara Hutton. 1934. PARIS MATCH / © Nicolas Krieff
Autre sujet de choix, ce serpent de platine et diamants au ventre émaillé aux couleurs du Mexique. Le reptile fait près de 60 centimètres de long. «Ce collier a été créé en 1968 pour l’actrice mexicaine Maria Félix. Il se dit qu’elle adorait le faire tournoyer tel un lasso au-dessus de sa tête. Les bijoux témoignent non seulement de l’identité et du style d’une maison mais racontent, à leur manière, l’évolution de la société, l’émancipation des femmes qui les ont portés», analyse la conservatrice. En 1975, la Sud-Américaine ajouta un autre animal à sa ménagerie d’or et de pierres en commandant un collier crocodiles. Il se raconte qu’elle fit livrer à l’atelier un bébé saurien, vivant, afin que le joaillier puisse s’en inspirer. «J’ai toujours aimé les gros bijoux, et chez Cartier j’ai pu avoir de gros bijoux, mais de bon goût», confia Maria Félix.
Ouvragé. Récemment acquis, ce diadème en cristal de roche et diamants du début du siècle dernier. 1912. PARIS MATCH / © NICOLAS KRIEF
Tout aussi révélateur, l’amour de la duchesse de Windsor pour sa célèbre broche féline, considérée comme « la Joconde de la Collection Cartier». La panthère dominant un saphir de plus de 150 carats en dit davantage sur les ambitions de la duchesse qu’un long discours. «Aujourd’hui nous l’avons oublié, mais, dans les années 1920, lorsque Jeanne Toussaint, la muse de Louis Cartier, fait de la panthère son animal fétiche, elle provoque un séisme dans la joaillerie en s’appropriant la symbolique d’indépendance et de puissance attachée à ce fauve. Les “influenceuses” de l’époque, telles Daisy Fellowes, la duchesse de Windsor ou Barbara Hutton, venaient chez Cartier pour avoir un bijou à la hauteur de leur personnalité», observe Pascale Lepeu.
Mythique. Commandé par Maria Félix, ce collier crocodiles en or, émeraudes et diamants jaunes. 1975. PARIS MATCH / © Nicolas Krieff
En témoigne cette bague boule sertie de saphirs récemment acquise, dont la rondeur et la force ne sont pas sans rappeler le tempérament de sa propriétaire, l’actrice italienne Silvana Mangano, mariage de la glace et du feu. À ses côtés, un ras de cou en or jaune torsadé et diamants de 1950, presque modeste, appartenait à Simone Signoret. Dans ce coffre-fort imprenable, certains joyaux racontent l’histoire de leur propriétaire. Tel Michael Todd, le troisième mari d’Elizabeth Taylor, si pressé d’offrir à son épouse une somptueuse parure en diamants et rubis que le vendeur n’eut pas le temps de lui expliquer que le collier pouvait aussi être porté en diadème. L’actrice, qui reçut ce présent alors qu’elle nageait dans une piscine à Saint-JeanCap-Ferrat, se servit de l’eau comme miroir, ne pouvant résister au plaisir de l’essayer immédiatement.
Art déco. Collier créé pour le maharaja de Patiala. En platine, diamants blancs et jaunes. 1928. PARIS MATCH / © Nicolas Krieff
Quant au diadème en diamants et perles de Lady Allan, commandé à Cartier en 1909, il a survécu au naufrage du «Lusitania», torpillé par les Allemands en 1915, grâce à la femme de chambre, qui pensa à l’emporter. Un siècle après, ce bijou sauvé des eaux a été racheté aux enchères par le joaillier pour environ 800000 euros.
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